Marese


J’ai perdu mes oiseaux
D’azur
Et d’illusions
J’ai perdu mes chevaux
De glaive
Et de passions
J’ai perdu mes bateaux
D’air pur
Et d’évasions
J’ai perdu mes châteaux
De rêve
Et d’ambitions…

Sur les rocs d’Ouessant
Poussent d’étranges fleurs
Et les fous de Bassan
Ont changé de couleur
Le ciel est menaçant
Sur les marins pêcheurs
Et les navires passant
Dans la passe font peur

J’avais des ciels de traîne
Peuplés de cerfs-volants
Que retenaient, captifs
Des gamins d’outre-mer
J’avais les poches pleines
De coquillages blancs
Pêchés sur les récifs
Qui me chantaient la mer
J’avais juste seize ans
Et tu en avais treize
Tu m’offrais l’océan
De tes yeux verts, Marèse

Sur les rocs d’Ouessant
Poussent d’étranges fleurs
Et les fous de Bassan
Ont changé de couleur
Sur le granit blessant
Les lames en fureur
S’éteint l’or dans le sang
De l’horizon qui meurt

J’avais des chevauchées
Dans les soirs fabuleux
Vers des champs de mois d’août
Eclaboussés d’or pâle
Et des trésors cachés
Dans l’infini d’un bleu
Mystérieux et d’où
M’arrivait mon étoile
Ton souvenir me vient
Comme un souffle à la braise
Et ma mémoire te tient
Pour un instant Marèse

Sur les rocs d’Ouessant
Poussent d’étranges fleurs
Et les fous de Bassan
Ont changé de couleur
La marée qui descend
Libère d’âcres senteurs
Et les vieux d’Ouessant
Emprisonnent des pleurs

Tu m’avais fait seigneur
D’un pays lumineux
D’un royaume inventé
Par une souveraine
J’avais le ciel rieur
Au miroir de tes yeux
Tout au long d’un été
C’était là mon domaine
Les années ont passé
Les bonnes, les mauvaises
As-tu bien traversé
Tout ce temps-là, Marèse…

J’ai perdu mes oiseaux
D’azur
Et d’illusions
J’ai perdu mes chevaux
De glaive
Et de passions
J’ai perdu mes bateaux
D’air pur
Et d’évasions
J’ai perdu mes châteaux
De rêve
Et d’ambitions…